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Faire vivre un ouvrage
Cela fait un moment que j'ai envie de parler du chemin parcouru et de ce que les échanges avec vous, lecteurs et lectrices, m'ont apporté. Depuis le début de l'aventure de "La face cachée d'Internet", j'ai l'impression d'avoir vécu au moins deux vies. (C'est la version enjolivée de "j'ai vieilli"... mais passons.) Depuis le début de l'écriture, il y a eu la publication, les soucis d'e-book, les réimpressions de la version brochée, le Prix du Livre Cyber "Grand Public" du FIC 2018, l'annonce de la ré-édition en version poche et des dizaines d'interventions publiques et privées, du cours en fac au séminaire d'entreprise, de la dédicace dans la petite librairie à Trifouillis-les-Oies à la keynote pour des confs à forte visibilité.
Mais avant tout, il y a eu énormément d'échanges, de débats et de partage. Dans ces quelques lignes, j'aimerais y revenir.
Un livre
Ecrire un livre, c'est passionnant. On apprend beaucoup. On développe un vocabulaire exceptionnel en matière de jurons. On ré-apprend beaucoup, aussi, sur ses propres (in)compréhensions et (in)certitudes. On voit des idées naître, grandir, éclore, se muer. Certaines vivent mal le fait d'être supprimées de la version finale du livre, alors elles se retrouvent sur des blogs.
Vient le choix du titre... Quand j'ai rencontré Agnès et Maëva, mes éditrices chez Larousse que j'adore, elles avaient en tête le titre "La face cachée d'Internet". Au début, je n'étais pas fan, je me disais que le titre est sensiblement clickbait. Puis, avec le temps, avec l'évolution de l'écriture, j'ai également évolué et je me suis dit que ce serait intéressant de "prendre le taureau par les cornes", d'assumer ce titre et de jouer avec. Ce site, le mail correspondant et l'habillage des différentes présentations que je peux faire du livre en témoignent.
On se pose aussi des questions sur la couverture. Qu'est-ce qui est suffisamment attrayant sans être insignifiant et quelconque ? Qu'est-ce qui traduit le fil rouge sans travestir l'esprit ? Au final, vous n'avez pas énormément de marge de manœuvre : après tout, vous, l'auteur-e, n'êtes pas le public cible. Je sais que certain-es ont pu trouvé la couverture quelque peu criarde. Me concernant, tout comme le titre, je l'assume et je l'aime bien (on y reviendra). Vous avez cependant échappé à vraiment criard : la couverture actuelle avec, en gros dessus, le masque Anonymous...
Une fois les émois esthétiques passés, vous trépignez de recevoir la version finalisée mise en page. Je n'étais pas déçue : le facteur a apporté un monstre de papier que j'ai tenu sur mes genoux pendant 1 semaine en essayant tant bien que mal de finir les corrections. Si vous avez constaté des coquilles dans la tout première impression, c'est parce que je ne voyais plus ce que je lisais. Après les séances d'autoflagellation nommée "Chapitre 1" (c.-à-d., ses 5 versions, tellement j'étais mécontente du contenu), les relectures successives et l'effort de préserver, toujours toujours toujours, une cohérence du tout, j'en avais la nausée en relisant. Par endroits, la copie papier déteignait et j'avais ainsi les mains un peu sales... (J'ai échappé au pire : être l'inspiration de Sartre.)
Au bout de ces errances intellectuelles, physiologiques et émotionnelles est le BAT. Dans le jargon de l'édition, c'est la version tamponnée "bon à tirer". Le BAT part chez l'imprimeur lequel répond avec un livre complet, couverture, mise en page et autres chapitrages inclus. Recevoir la matérialisation de tant d'investissement personnel, ça fait verser une larmichette même à une cynique endurcie telle votre serviteure.
Un ouvrage
J'ai accepté d'écrire sur "les dark trucs sur Internet", pour reprendre les échanges premiers avec mes éditrices. A notre rdv de prise de contact, je suis allée avec ma nonchalance habituelle, j'étais curieuse de savoir ce que Larousse venait chercher sur ce terrain. Notre rdv de prise de contact a duré plus de 4 heures. On s'est rencontrées, mes éditrices et moi. Je parle d'une vraie entente. Au bout des 4 heures et demi, j'en suis sortie lessivée, mais on avait un cadre, un fil rouge et un accord de principe sur le format et la longueur. Et on a senti qu'on pouvait travailler ensemble, que malgré les différences de connaissances, de perception, d'analyse, on avait un but commun et une compréhension mutuelle de ce à quoi devait servir cet ouvrage.
Eh oui, ça change tout. Parce qu'en réalité, j'ai déjà écrit un chapitre de livre, des mémoires et rapports divers, de nombreux articles (de recherche et destinés aux médias de tous genres), un livre à 4 mains,... Faire l'ouvrage qu'est "La face cachée d'Internet" a surtout nécessité un environnement porteur et une confiance. Dans les autres cas, je fournissais un livrable, un devoir ou je réagissais à un sujet d'actualité. Il y a eu des moments ennuyeux et frustrants avec "La face cachée" aussi, mais globalement, je me suis bien marrée.
Et toute la magie est là. J'ai ouvragé un livre pour qu'il apporte de la connaissance, de la curiosité, des blagues pourriTes, un peu de répit de la constante et épuisante dialectique de la peur. Oui, même si parfois, il faut s'accrocher, il ne reste pas moins que mon plus jeune lecteur a 11 ans ! Oui, les références sont péniblement formatées, mais j'ai réussi à nourrir mon propos sans qu'il paraisse comme un argument d'autorité. Parfois, le langage est plutôt familier que commun, je sais que d'aucuns en ont été perturbés. Oui, je connais la frontière entre la familiarité et le commun, entre le formel et le châtié... et je m'en amuse, j'y saute à pieds joints. Mais pour toi qui lis, c'est comme si je te parlais et cette proximité, cette participativité, je la chéris.
Alors non, je ne pense pas avoir pris le melon en pensant que j'ai ouvragé 350 pages de réflexion collective sur les enjeux du numérique. Même les choses prétendument anodines se sont prises à ce jeu. Par ex., si vous faites partie des sachant-es de la technique, il se peut que je vous pose la question des deux bugs sur la couverture. Sauriez-vous les trouver ? Pour les passionné-es, sauriez-vous attribuer le code sur la couverture ?...
La lecture active
Je parle comme j'écris et j'écris comme je parle. (Et je vise la concision, promis craché...) Ce n'est pas toujours simple. J'ose espérer que ce faisant, on parvient plus aisément à faire siens les questionnements dont sont gavés nos (més)usages numériques. Grâce à l'écriture, j'ai assumé mon rôle d'interface. Et "La face cachée d'Internet" est une action de médiation et de salubrité numérique.
C'est pourquoi j'avais trouvé naturel d'accompagner la lecture. Que ce soit au travers de conférences, dédicaces, interventions diverses, que ce soit en aidant des journalistes à s'approprier des sujets complexes pour en rendre compte avec justesse, etc. C'est épuisant, je ne le cache pas, rien que parce que parcourir la France en long et en large en moins de 10 jours, 2 fois par mois, ça crève. Et arrive le moment où vous vous rendez compte qu'on vous reconnaît. C'est perturbant : dans le TGV, sur le quai du métro, dans un co-working,... Lors d'évènements pros de tous genres, les gens vous approchent avec un grand sourire et un "Bonjour Rayna !" avenant. Pendant que vous sentez presque se matérialiser la légendaire goutte de sueur froide sur votre tempe en cherchant désespéramment qui est la personne, vous entendez immanquablement "J'ai lu votre ouvrage, vraiment super !".
Être accessible pour répondre, expliquer, recentrer, démystifier, clarifier, faire un tuto sur un gestionnaire de mots de passe par mail à mon éditrice, aiguiller des gens sur des questionnements de carrière ou de formation, préciser que je ne pirate pas de comptes Snap pour nourrir l'espionnite parentale ou conjugale, laisser mes DM Twitter ouverts pour faciliter le contact (et le regretter amèrement en voyant arriver de la drague lourde), réparer la connexion Internet de ma gynéco, faire une prière à la divinité des talons pour m'aider à ne pas me vautrer en montant recevoir le Prix du Livre Cyber des mains de la ministre de la Défense,... Ce sont autant de signes de confiance et, quelque part, un pas dans la direction d'une meilleure compréhension et maîtrise des enjeux.
Et pour finir, en tentant de perpétuer ma réputation de personne hautaine, je reconnais que tout ceci est épuisant et... j'en suis reconnaissante. Même si "La face cachée" m'a aidé à faire une synthèse et à identifier à quoi j'aimerais consacrer mon jus de cerveau, je n'ai pas écrit pour moi. J'ai ouvragé des bouts de mon histoire de vie dans ce livre et vous avez su ouvrager le livre dans vos histoires de vie. Merci... et à une prochaine :-)
[Billet originalement publié fin janvier 2019. Suite à un énorme souci côté hébergeur qui a perdu l'intégralité du site et aucune sauvegarde n'est disponible, j'ai dû refaire le blog...]
Le vote électronique : une illusion démocratique ?
"La face cachée d'Internet" contient quelques interviews avec des personnes spécialisées dans différents domaines du numérique. L'une parmi elles est Benoît Sibaud qui s'intéresse depuis des années aux questions et enjeux du vote électronique (qu'il soit par ordinateur ou par Internet).
Comme il a beaucoup été question d'élections ces derniers mois, je publie ici l'interview que j'ai réalisée avec lui et qui fait partie du livre. Le sujet est complexe, avec des ramifications diverses. C'est pourquoi, ne soyez pas surpris-es de voir quelques renvois en notes de bas de page :-)
Bonne lecture et ne perdons pas de vue l'importance des outils techniques pour notre démocratie !
Qui es-tu et comment es-tu tombé dans le vote électronique ?
J'ai une formation d'ingénieur en informatique. Professionnellement, j'ai été développeur, avant de me tourner vers le domaine de l'intégration et du test de solutions logicielles. Associativement, je suis actif et militant dans le domaine du logiciel libre, à la fois d'un point de vue technique mais aussi politique (au sens vie de la cité, indépendamment de la politique mandataire, des partis). Je suis par exemple un des webmestres du site d'actualités LinuxFr.org depuis dix-sept ans et j'ai été administrateur de l'April (association de promotion et de défense du logiciel libre) pendant dix ans (dont cinq ans de présidence). Dit autrement, je baigne dans les questions liées au numérique, aux libertés et à la politique.
Je me suis intéressé au vote électronique via les libristes : l’affaire dite « du 13e bit belge » en 2003 a été évoquée sur une liste de discussion liée au logiciel libre. Il s'agissait d'une erreur de 4096 votants lors d'un vote électronique en Belgique, due a priori à une erreur informatique. C'était au début un simple sujet d'intérêt. Puis la ville où je réside, Issy-les-Moulineaux, a fait le choix en 2006 de passer au 100% vote électronique par machines à voter (des ordinateurs de vote) pour les élections institutionnelles. J'ai suivi le sujet depuis, essayant de montrer les limites et les problèmes posés par le vote électronique dans ce cadre-là. J'ai écrit à mon maire comme simple citoyen, publié divers documents relatant mon expérience dans les bureaux de vote, participé (pour l'April) au sein du Forum des Droits sur Internet à un groupe de travail sur le vote électronique en 2007 et en 2008, collecté les procès-verbaux des différents scrutins de la ville, etc. (note de Rayna : la page Wikipédia est d'ailleurs illustrée d'une de ses photos).
En parallèle, j'ai été confronté plusieurs fois à des scrutins non institutionnels en vote par Internet : les élections de conseil de quartiers à Issy-les-Moulineaux, les élections associatives de l'April, des élections professionnelles, des élections d'assemblées générales d'entreprise, etc.
Mes actions précédentes m'ont permis d'être délégué lors du vote par Internet pour les Français de l'étranger lors des législatives de 2012 et 2013, donc d'assister aux réunions préparatoires du « bureau de vote électronique (BVE) » au Ministère des Affaires étrangères et européennes et aux dépouillements.
Dans toutes ces actions, j'ai veillé à agir en tant que citoyen, à être assesseur/délégué pour divers partis (MoDem, PS, Parti Pirate) pour ne pas être étiqueté, et à rester dans l'argumentation, la publication d'informations étayées et le partage d'expérience.
De ton expérience en tant qu'assesseur et délégué lors d'un vote par Internet, quels sont tes retours de terrain ?
Les aspects les plus terre à terre sont rapidement apparus : la mise en place de vote par ordinateurs de vote a été un choix politique mis en place dans la précipitation, sans vrai débat, et malgré les avertissements des experts techniques mais aussi de juristes. On a donc un code électoral bricolé à la va-vite[1] et des solutions techniques souffrant de problèmes basiques[2] : les scrutins n'intéressent le législateur et les vendeurs de solution qu'en période électorale, personne n'investit du temps ou de l'argent en période calme, et de toute façon le marché est petit (les scrutins sont peu nombreux) et fragmenté (chaque pays a son code électoral, sa langue, ses contraintes propres). Rappelons juste que l'évolution électorale est itérative et finalement plutôt lente : pour la France, vote des femmes en 1944, urne transparente en 1988, règles de financement des partis en 1990, prise en compte de la diaspora pour l'Assemblée en 2008 et vote blanc en 2014.
Mais derrière les basses questions techniques apparaissent des questions bien plus fondamentales, démocratiquement parlant. Un des points essentiels autour du vote électronique, par ordinateurs de vote ou par Internet, est la fausse impression de simplicité que tout un chacun a initialement sur le sujet. L'Homme a été sur la Lune, a des distributeurs bancaires et des voitures qui se conduisent toutes seules, ça ne doit pas être bien plus compliqué. Sauf que pour le vote électronique, les contraintes sont nombreuses : il faut assurer le secret du vote, éviter la possibilité de prouver pour qui l'on a voté (et donc de vendre son vote), empêcher de relier l'électeur à son bulletin, respecter la codification du code électoral, permettre de s'assurer de la sincérité du scrutin, être facilement utilisable par l'électeur, etc., etc.
Et ces contraintes vont rendre impossible certaines caractéristiques existant avec le scrutin papier : ce dernier est explicable facilement à un enfant. Bulletin, enveloppe, urne, assesseurs et scrutateurs, décompte, etc. C'est simple, explicable (pourquoi chaque étape est ainsi) et abordable par les sens (des objets palpables, une enveloppe suivie des yeux dans une urne transparente, etc.). A contrario le vote électronique est accompagné de la dématérialisation (impossible de voir les électrons migrer dans l'ordinateur ou les photons se déplacer dans la fibre optique, impossible de percevoir ce que fait réellement l'ordinateur, fait-il ce qu'il faut, juste ce qu'il faut ?).
Et il amène aussi une monstrueuse complexité en termes de connaissances, obligeant à faire confiance à des experts : physique des semi-conducteurs, électronique, informatique, cryptologie, télécommunication et réseaux, etc. ; pas seulement hors de portée d'un enfant ou d'un électeur, mais aussi de tout expert pris individuellement. Comment l'électeur va-t-il s'assurer de la sincérité du scrutin ? Et l'assesseur ? Et le scrutateur ? Quelle confiance vont-ils avoir dans ce fondement de la démocratie ? Que penser de la citation du rapport d'un expert observant un vote pour l'Assemblée des Français de l'étranger en 2006 : « [les assesseurs] ont pu voir en permanence, sur un écran, l'image d'une salle informatique dans laquelle des ordinateurs fonctionnaient » ?
De fait les contraintes précédemment évoquées sont contradictoires : il n'est pas possible[3] d'avoir à la fois un scrutin qui soit à bulletin secret, explicable à tous (avec une vraie compréhension) et vérifiable par les électeurs. Le vote électronique impose donc des choix, et actuellement, en France et sur les scrutins institutionnels, il se fait sans être explicable à tous et sans être vérifiable.
On entend beaucoup que le vote électronique, c'est plus moderne et moins cher. Qu'en est-il ? Et quelles évolutions en France ?
Pour mémoire, le vote électronique ne modifie en rien la campagne électorale ou la gestion de la liste électorale, il modifie uniquement la partie scrutin et dépouillement.
Le vote par ordinateurs de vote (institutionnel) est en sursis en France, après un rapport d'information du Sénat en 2014 qui parlait de « régler le sort des machines à voter », un moratoire des agréments pour les machines (toujours les trois mêmes solutions depuis 2007) et pas de nouvelles autorisations pour les communes. Le déclin est perceptible avec un passage de 83 communes et 1,5 million d'électeurs en 2007 à 66 communes et 1 million d'électeurs en 2014. Techniquement la « modernité » évoquée en a pris un coup puisqu'il s'agit de vieux ordinateurs de plus de dix ans, sans mises à jour logicielles ou matérielles, avec des failles connues et publiées, et interdits dans divers pays (dont leurs pays d'origine).
Ils sont aussi générateurs de files d'attente plus longues (interface lente, découverte de la machine, temps de choix et de confirmation sur la seule machine disponible, absence d'isoloir, émargement inchangé, quasi-impossibilité de faire voter 1000 électeurs en 10h avec 36s par électeur). Par contre ils accélèrent le dépouillement : le résultat est instantané (mais non vérifiable), ce qui n'est pas forcément indispensable pour des mandats durant des années et pour des scrutins finalement rares, mais permet de passer vite à la télévision[4]. Concernant le coût, il n'y a pas d'informations nationales consolidées sur le sujet. Sur les aspects écologiques, il s'agit d'écrans tactiles à cristaux liquides, d'électronique, de batteries, etc., et il y a toujours les professions de foi papier. Les possibilités de voter plus souvent ou de voter suivant d'autres méthodes de vote (classement, élimination, etc.) ne sont pas utilisées (ni prévues dans le code électoral). Notons enfin que les ordinateurs de vote ont rendu le vote blanc explicite (un bouton ou un choix « vote blanc ») et fait disparaître le vote nul.
Le vote par Internet a ses problématiques propres : des pressions peuvent être exercées sur l'électeur à son domicile, il peut plus facilement vendre son vote, le vote peut être bloqué depuis un pays donné ou perturbé par un pays voyou, l'ordinateur/le mobile de l'électeur peut être mal configuré ou infecté, etc. Il s'adresse surtout à une diaspora qui a des problématiques propres : les urnes physiques (ambassades ou consulats) peuvent être distantes de plusieurs centaines ou milliers de kilomètres, le pays peut être hostile ou dangereux, les services postaux peuvent y être de mauvaise qualité (problématique pour le vote par correspondance), etc. Le vote à l'urne est donc compliqué, le vote avec procuration aussi (il faut aller l'établir), le vote par correspondance est peu fiable (en particulier avec un entre-deux tours en une semaine) et le vote par Internet a donc ses propres limites (et notamment le fait d'être interdit pour certaines élections, dont la présidentielle).
Il doit être vu comme un pis-aller suivant les directives du Conseil Constitutionnel mettant la priorité sur le droit de l'électeur de pouvoir exercer sa citoyenneté par le vote, par rapport à son droit à un vote vérifiable par exemple (ou par rapport aux critères internationaux qui préfèrent le vote à l'urne aux méthodes avec intermédiaires comme la procuration ou la correspondance papier ou électronique). Les diverses limitations évoquées ici ont conduit le Ministère des affaires étrangères et européennes à considérer que c'était une solution acceptable pour la diaspora, mais à ne pas vouloir la généraliser au reste du corps électoral. Et tout récemment, le 6 mars 2017, le Gouvernement a annoncé ne pas recourir au vote par Internet pour les élections législatives de juin 2017, « sur la base des recommandations des experts de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes informatiques (Anssi) » : « C’est essentiellement un risque d’image (…). On ne peut exclure un risque sur la sincérité, mais ce qui est plus probable, en termes de faisabilité, c’est une attaque majeure qui rende le système indisponible (…) avec un impact important sur l’image du fonctionnement de la démocratie. »
2017 pourrait donc être une année particulièrement marquante pour le vote électronique sous toutes ses formes.
[1] Deux exemples :
- Le code électoral exige une urne unique par bureau de vote et un isoloir pour 300 électeurs dans des bureaux de vote autour d'environ un millier d'électeurs, un ordinateur de vote est une urne et un isoloir.
- Décret n° 2014-290 du 4 mars 2014 portant dispositions électorales relatives à la représentation des Français établis hors de France : les critères pour les délégués pour le vote papier ou pour les ordinateurs de vote (électeur du département, pas de restriction pour le parti) ne sont pas les mêmes que ceux pour le vote par Internet (n'importe qui, mais le parti doit se présenter dans au moins 3 circonscriptions), créant ainsi deux classes de citoyens et de partis.
[2] Deux exemples montrant certains tests simples n'ont pas été faits :
- Les ordinateurs de vote américains ES&S iVotronic utilisés à Issy-les-Moulineaux gère mal les accents et la datation d'ouverture/fermeture du bureau de vote (« Ouvert 65516:65525:65502 64800/01/1994 »). Sans parler du fait que les codes de sécurité sont constants et publics (la date du référendum sur le traité de constitution européenne de 2005).
- La solution espagnole Scytl de vote par Internet utilisée pour les législatives en 2012 a été le premier cas de vote nul (jusqu'alors considéré impossible en vote électronique) : un électeur a réussi à voter au second tour pour un candidat éliminé au premier tour, bloquant le décompte du second tour et obligeant à recourir à une seconde procédure (sic) de comptage.
[3] En l'état actuel des connaissances, mais il paraît difficile de voir comment il pourrait en être autrement, sauf à rendre nos sens capables de percer la dématérialisation et à rendre chaque électeur expert multi-domaines. Sans parler du secret industriel commercial opposé par les fabricants.
[4] Je ne résiste pas à mentionner la ridicule possibilité de recomptage par la machine, qui permet de redemander autant de fois que l'on veut à une machine si son décompte est toujours le même.
[Billet originalement publié le 8 août 2017. Suite à un énorme souci de migration côté hébergeur qui a perdu l'intégralité du site et aucune sauvegarde n'est disponible, j'ai dû refaire le blog...]
Le livre numérique est disponible !
L'été est là et, canicule ou pas, face cachée ou pas, est loin d'être le ressac tranquille que l'on imagine.
Alors, pour patienter le temps que je vous prépare le petit livre d'or et quelques réflexions supplémentaires, voici la version epub pour les plus "numériques" parmi nous :-)
chez GooglePlay, le magasin applicatif Android ;
chez iTunes, le magasin applicatif d'Apple ;
sur Mollat.com, le site web très bien fourni de la célèbre librairie bordelaise.
Si vous souhaitez miser sur le papier, vous pouvez soit cliquer sur les boutons pertinents en page d'accueil de ce site, soit vérifier la disponibilité du livre dans les différentes librairies en France ou plus spécifiquement à Paris.
Je ne peux pas terminer ce court billet autrement qu'en vous remerciant très très très chaleureusement : depuis sa sortie, le livre est le numéro 1 des ventes sur Amazon dans plusieurs catégories ("Informatique et Internet", "Sécurité informatique", "Sociologie") et numéro 5 dans "Sociologie - Démographie". Il est également "coup de cœur des Libraires" à la Fnac. Quelle meilleure récompense pour mon travail d'écriture que votre intérêt :-)
Et n'oubliez pas : si vous avez des questions, remarques, critiques constructives, le plus simple est de m'écrire. Pour les adeptes des réseaux sociaux, c'est par là (Twitter, LinkedIn).
[Billet originalement publié le 18 juillet 2017. Suite à un énorme souci de migration côté hébergeur qui a perdu l'intégralité du site et aucune sauvegarde n'est disponible, j'ai dû refaire le blog...]
Conférence et dédicace à Pas Sages en Seine #PSES2017
Aujourd'hui commence le festival de cultures numériques libres PSES, ou Pas Sages en Seine. J'y parlerai à deux reprises :
Une conférence sur le sexe à l'heure du numérique. Il s'agit d'un petit projet de recherche perso que je mène à 4 mains avec le sociologue Fred Pailler. Les slides sont ici (PDF).
Une conférence-débat sur les enjeux du numérique et "La face cachée d'Internet". J'y serai accompagnée par Bortzmeyer.
(La conférence a été enregistrée et la vidéo est disponible en ligne.)
Enfin, une dédicace informelle aura lieu pendant les journées de vendredi et samedi. Vous pouvez me trouver sur le stand de La Quadrature.
[Billet originalement publié le 29 juin 2017. Suite à un énorme souci de migration côté hébergeur qui a perdu l'intégralité du site et aucune sauvegarde n'est disponible, j'ai dû refaire le blog...]
"La face cachée" rencontre déjà un franc succès : MERCI !
Deux messages importants, donc. Je ferai ma première dédicace avec mon préfacier ce soir, le 21 juin à partir de 18h, à la librairie A Livr'Ouvert, 171b Bd Voltaire 75011 Paris (M° Charonne). Au plaisir de vous y voir et merci à la librairie pour l'accueil !
L'autre message est notre discussion à bâtons rompus avec les copains de chez Framasoft. Voici l'entrée en la matière :
Nous sommes bombardés presque chaque semaine d’alertes à la catastrophe numérique ou de pseudo-enquêtes au cœur du Dark Web, censé receler des dangers et des malfaisants, quand il ne s’agit pas d’une conspiration pour diriger le monde. Une fois retombé le coup de trouille, on se remet à regarder des photos de chatons sur le ouèbe. Mais un éclair de lucidité, parfois, troue le brouillard : comment je sais ce qu’il y a de vrai là-dedans ? Entre la fantasque théorie du complot et les authentiques agissements de personnages obscurs, comment trier ?
Il n’est pas facile d’accéder à une information fiable : les spécialistes sont peu nombreux, plutôt discrets (nous avons par exemple vainement essayé pendant deux ans d’obtenir une interview d’une « pointure »), voire peu enclins à communiquer au-delà des anathèmes volcaniques qu’ils déversent de loin en loin sur les mauvaises pratiques, ce qui n’aide pas trop le commun des mortels. C’est pourquoi la parution récente du livre de Rayna Stamboliyska « La face cachée d’Internet » nous apparaît comme une excellente nouvelle : son livre est celui d’une spécialiste qui s’efforce de mettre à notre portée des éléments parfois épineux à comprendre. Quand on a comme elle fait une thèse en génétique et bio-informatique et un master spécialisé en « défense, sécurité et gestion de crise », on n’a pas forcément l’envie et le talent de s’adresser à tous comme elle fait fort bien.
Merci donc à Rayna pour cet effort d’éducation populaire et pour avoir accepté de répondre à quelques questions pour le Framablog, parce qu’elle ne mâche pas ses mots et franchement ça fait plaisir.
La suite de cette discussion à propos de la face cachée du web, de la vie, de l'univers et du reste est à lire sur le Framablog.
[Billet originalement publié le 21 juin 2017. Suite à un énorme souci de migration côté hébergeur qui a perdu l'intégralité du site et aucune sauvegarde n'est disponible, j'ai dû refaire le blog...]
La bibiographie en version numérique
De nombreuses personnes m'ont demandé de mettre à disposition les ressources bibliographiques du livre. Au total, j'en ai compté 475, la majorité étant des sources web.
Chose promise, chose due ! Vous trouverez donc ci-dessous les sources hors notes de bas de page, en version numérique (PDF ci-dessous via SlideShare, ODT, TXT, DOC).
[Billet originalement publié le 14 juin 2017. Suite à un souci de migration côté hébergeur, j'ai dû refaire le blog...]